Nous pouvons analyser l’ouverture de la pêche à la truite selon différentes typologies de poissons ou de parcours.
Truites surdensitaires : misez sur l’agressivité !
Les truites d’élevage fraîchement introduites dans les cours d’eau de première catégorie présentent un comportement singulier, inhérent à leur naissance en pisciculture : elles sont actives précocement et réagissent très bien à l’agressivité. Ainsi, la capturabilité de ces poissons demeure importante contrairement à leurs consœurs endémiques ramollies par la conjoncture eau froide/sortie de reproduction.
Pour espérer croiser leur route, il faudra les rechercher sur les parcours spécifiques. Généralement faciles d’accès et bien répertoriés par les fédérations de pêche. Au niveau des dit-parcours, il est important de rechercher systématiquement les zones les plus profondes et lentes (si la rivière est située en montagne), ainsi que les coups marqués près des berges, où ces truites grégaires se regroupent souvent. A mesure que la journée avance, on privilégiera les postes les plus encombrés et éloignés qui supportent mieux la pression de pêche.
Un calme profond en bordure : un excellent coup !
Si toutes les techniques sont susceptibles de les faire mordre (la sélectivité n’est pas leur caractéristique première), l’optimisation pousse à utiliser celles qui tiennent compte de leur comportement joueur. Ainsi, on utilisera au maximum le stimulus vibratoire et l’animation. La pêche aux leurres est ainsi toute indiquée. Des cuillères de numéro 2 au moins (pour présenter une belle bouchée) ainsi que des poissons nageurs suspending ou coulant selon la profondeur, de 5 à 7 cm sont tout indiqués.
En ce qui concerne la pêche aux appâts naturels, la technique reine est le vairon mort manié. Le pêcheur au toc de son côté, devra oublier les belles dérives naturelles au profil de l’utilisation de plombées lourdes de plusieurs grammes, permettant d’animer les montages et de faire tourner les appâts à la récupération (lorsqu’on pêche à la teigne par exemple, l’une sera enfilée, l’autre épinglée). Cet aguichage est bien plus rentable que la pêche en dérives naturelles !
Ouverture truite sur truites sauvages : éloge de la lenteur.
En mars, les truites sauvages sortent de la période de reproduction. Amaigries, peu mobiles et assez confinées aux abords des caches. Leurs périodes alimentaires, assez courtes (les eaux froides rallongent le temps de digestion) coïncident souvent avec les heures les plus chaudes de la journée (le meilleur: le créneau 12-16h).
On les trouvera principalement sur les bordures, au niveau des zones amorties. Les portions de rivière qui présentent un grand linéaire de ce type sont les meilleures. Dans les régions montagneuses, vous trouverez ces configurations au niveau des parties élargies et moins pentues où le courant s’assagit. Les techniques de pêche doivent permettre de peigner méthodiquement ces zones porteuses en présentant l’appât au ras du fond. En mars, les rares zones porteuses concentrent les poissons.
Une bordure amortie parsemée de blocs qui mérite qu’on s’y attarde
Rien ne sert de courir, une fouille méticuleuse des postes favorables est plus rentable qu’une grande course (surtout lorsqu’on tient compte de la fréquentation assidue des berges). 200m propices peuvent sauver votre journée d’ouverture! Pour cette pêche intensive, le toc en dérive naturelle et le vairon manié sont les mieux indiqués. Les plombées doivent être suffisantes pour maintenir l’appât près du fond sans (trop) s’accrocher.
La plombée au toc doit être basse et concentrée (voir l’article toc : comment choisir sa plombée ?) ; les grammages de la monture Plasseraud iront généralement de 2 à 5 gr suivant le débit. Dans les deux cas, il faut ralentir la dérive au maximum. L’appât doit évoluer moins vite que le courant de surface, quitte à couper légèrement les veines d’eau. Les meilleurs appâts sont les classiques vers et teignes.
Bonne ouverture à tous !
Ailleurs sur le site, quelques conseils pour réussir votre ouverture de la truite :
J’aime la pêche de la truite dans les Cévennes. J’affectionne particulièrement le versant méditerranéen de ce massif, où le chant des cigales et une délicieuse odeur de pin vous accompagnent lors de vos pérégrinations halieutiques.
Dans ce coin de la France, les truites sont de taille modeste (substrat granitique oblige) mais rustiques et en bon nombre (surtout depuis 5 ans qu’une conjoncture climatique favorable s’est installée). Les eaux souvent basses produites par l’influence climatique méridionale induisent une pêche fine très plaisante.
La qualité des poissons qu’on y trouve n’est pas tant due à une gestion exemplaire des APP du coin qu’aux pressions naturelles sévères qui se chargent d’exterminer tout individu non génétiquement adapté (entre les étiages extrêmes durant lesquels les rivières se transforment en une succession de flaques d’eau chaudes et les crues automnales pour le moins décapantes, on ne peut pas dire que la Nature ménage ses hôtes dans cette région).
Le bassin versant en question comporte plusieurs rivières à truites de petit calibre, et qui correspondent assez bien à ce qu’on pourrait appeler des « coins moyens ». Dotés de caractéristiques intrinsèques assez banales, d’une productivité loin d’être faramineuse, mais suffisamment peu fréquentés pour conserver une qualité de pêche correcte, tout au moins suffisante pour moi.
Pas de planification stratégique pour cette ouverture de la pêche de la truite dans les Cévennes
L’ouverture constitue l’unique sortie de l’année qui ne soit pas planifiée selon des paramètres stratégiques.
Débuter la saison dans les Cévennes est plutôt devenu un rituel annuel qui coïncide avec une visite familiale dans le Gard.
Depuis 3 ans, je rencontrais des conditions en mars quasi parfaites; des niveaux tendus juste-comme-il-faut et une température d’eau favorable autour des 10°C.
Cette année, la donne s’annonçait toute autre. Dès la mi-février, l’omniprésence de l’anticyclone laissait présager des niveaux bas, voire très bas, malgré ce que mes informateurs locaux (aveuglément optimistes) m’affirmaient.
… et dans cette région (comme dans pas mal d’autres), eaux basses = truitelles. Ma conscience m’interdisant d’esquiver ce rendez-vous pour d’autres contrées plus favorables, j’allais donc subir les aléas climatiques, ce qui ne manqua pas de me rappeler une règle empirique immuable : une partie de pêche réussie ne se prévoit pas à l’avance.
Maigre, ça l’était. « On s’croirait au mois d’août »
Les eaux très basses des cours d’eaux Cévenols en cette ouverture 2015 de la truite
Comparativement à la belle saison, une situation encore pire dans la mesure où les petites ruptures de pente agitées qui concentrent alors les truites restèrent désespérément vides dans cette eau à 7°C.
La pêche n’eut donc rien de passionnant et je vous ferai grâce de toute tentative de décryptage puisque je n’ai pas rencontré l’ombre d’une piste à suivre pour en améliorer le résultat (existait-elle seulement ? mieux vaut penser que oui !).
Un échantillon des poissons du week-end :
Dès mon retour dans les Hautes-Alpes, je retrouvais des rivières en ordre délaissées le temps d’un week-end. Elles allaient rapidement me faire oublier cette entrée en matière morose… à suivre !
Simon SCODAVOLPE
* Robert Louis Stevenson, est un grand écrivain écossais célèbre notamment pour son roman “L’Île au trésor”. Il effectua la traversée des Cévennes à pied et en fit le récit dans “Voyage avec un âne dans les Cévennes”. Un chemin de randonnée le gr70 porte aujourd’hui son nom.
La truite possède cette caractéristique exceptionnelle de pouvoir se pêcher avec un panel de techniques très large. Reflets d’un régime alimentaire éclectique et d’une agressivité carnassière décuplée à certaines périodes de l’année, ces multiples facettes en font un poisson unique en son genre. Sachant que toutes les techniques sont complémentaires et possèdent un moment phare durant la saison, il est d’autant plus regrettable de les voir parfois hiérarchisées selon des pseudos-caractères de sportivité ou de noblesse. Le pêcheur polyvalent qui fait fi de ces clichés grotesques, peut faire face au comportement changeant des poissons au fil de la saison. Au moment du choix de la technique pour l’ouverture de la truite, tous les pêcheurs n’ont pas les mêmes considérations.
Quelle technique choisir pour le début de saison?
Cette décision résulte généralement de la part accordée à la recherche d’efficacité pure et dure (car toutes les techniques ne sont pas égales selon le moment considéré), sacro-sainte pour certains, et supplantée par le goût naturel et les aspirations pour d’autres. Penchant plutôt du côté des plus pragmatiques (vous ne me verrez jamais prôner l’utilisation de telle ou telle technique pour son côté esthète), je porte généralement mon choix sur la pêche la mieux adaptée aux conditions du moment. Si vous souhaitez procéder de la sorte, voici quelques pistes à suivre qui tiennent compte du décor planté dans le précédent article « où pêcher à l’ouverture de la truite ? » :
Une belle fario de mars sous un rayon de soleil printanier
Quelque soit le contexte météorologique en ce deuxième samedi de mars, la froideur de l’eau inhibe tout excès de mobilité chez la truite sauvage (sauf cas particuliers d’appétence décuplée en parcours no-kill ou milieux extrêmement précoces). Votre montage doit donc passer lentement, au ras du fond et près du poisson pour espérer le séduire.
Penser à une offre calorique
De même, l’offre doit être assez calorique : les truites ont besoin de reconstituer leurs réserves et privilégient des proies assez conséquentes sans être très discriminantes au niveau de leur nature. Dans ce contexte, les appâts naturels (vairon compris) ont souvent le dessus, de part leur attractivité au ralenti et l’apport protéiné qu’ils représentent. La pêche aux leurres, qui misent sur l’agressivité, trouve son apogée en présence d’une température d’eau voisine de l’optimal thermique de la truite (situation qui survient entre avril et juillet suivant le type de biotope) ; tout excès de froideur réduit l’agressivité des farios et donne la suprématie aux esches naturelles.
Ainsi, pour l’ouverture de la truite, je considère les pêches au vairon mort manié et au toc comme deux valeurs sûres. Pour l’une et l’autre, la façon d’adapter votre matériel doit tenir compte des impératifs précédemment décrits.
1. Ouverture de la truite au toc
Quelque soit son habitude en matière de type de canne, il faut éviter les modèles trop courts en mars (erreur fréquente des adeptes des cannes à anneaux à emmanchements) : la conduite de ligne en présence d’eau profonde et de plombées lourdes (avec nécessité absolue de passer lentement, quitte à couper légèrement les veines) implique de soutenir légèrement le montage, sous peine de le voir quitter le courant de fond qui aimante les truites par eaux froides. L’angle entre le scion et la bannière doit rester aux alentours de la perpendiculaire.
Principales règles pour le matériel
- En pratique, 3,50m est un minimum en ruisseau, 3,90m en grands cours d’eau.
- Question montage, les grammages relativement importants facilitent les lancers et s’accommodent bien d’un corps de ligne en 14 ou 16/100 fluorescent, ainsi que d’un bas de ligne de 12 à 14/100, dont la résistance n’est pas superflue lorsqu’il s’agit d’assurer les combats par courant puissant.
- La plombée sera suffisamment lourde (surtout si les eaux sont fortes), basse (pour plaquer l’appât au fond) et concentrée (pour faciliter la mise en place du montage).
La pêche au toc à l’ouverture
Présenter l’appât près du fond sans lui accorder trop de liberté est indispensable à cette saison. La précision de la trajectoire de l’esche mérite votre attention toute l’année. Mais son importance est décuplée en mars lorsque la distance de stimulation des poissons est faible. Si une truite bien postée en mai daigne parfois se décaler de quelques dizaines de centimètres et pardonne une présentation hasardeuse, ne comptez pas sur de telles faveurs en mars.
Pour évaluer de façon précise la position de votre appât à partir du point d’entrée de la ligne dans l’eau, il faut le brider au maximum autour de la plombée de telle sorte qu’il se trouve dans l’alignement de la bannière (en pratique, cela revient à placer le plomb de touche à moins de 10cm).
2. Au vairon manié :
A différence du tocqueur qui accompagne simplement la dérive (la longueur de canne est alors déterminée par la distance à laquelle la ligne évolue), le pêcheur au vairon qui manie son appât doit tenir compte du type nage qu’il souhaite lui conférer.
La configuration du poste
- Ainsi, la longueur de canne n’est pas vraiment dictée par la largeur du cours d’eau comme au toc, mais plutôt par la configuration des postes et le type d’animation qui en découle : quelque soit le type de milieu considéré, si la majorité des coups nécessitent un maniement du vairon à l’aplomb du scion (cas typique des ruisseaux encombrés et cascadeurs formant des vasques), un modèle long est nécessaire. L’importance accordée au confort et à la maniabilité de l’outil façonne votre choix. Les meilleurs modèles pour prospecter sous la canne sont téléréglables et d’environ 5mètres, assez rigides en pointe pour ferrer efficacement. Au contraire, si un profil plutôt plat conduit à une présentation en dérive (qu’elles soient orientées amont, ¾ amont ou ¾ aval), une canne plus courte d’environ 3m est plus adaptée et polyvalente. Dans le cas où votre parcours présente une importante diversité de facies, un modèle de 3,30m à emmanchements apparaît comme un bon compromis pour ces deux actions de pêche.
Le choix de la monture
- Se pose ensuite la question du choix de la monture : en la matière, chaque pêcheur a ses convictions, plus ou moins objectives et rationnelles. Personnellement, je privilégie celles qui confèrent au vairon une nage naturelle, modulable par le biais des animations et non pas automatisée comme ce que produisent les godilles par exemple. Celle mise au point par Olivier Plasseraud est idéale pour pêcher à rouler, de part sa plombée interne.
- Alors que la monture casquée ou drachko vous condamne à une action verticale, la monture Plasseraud permet de prospecter efficacement les veines laminaires lentes. Le pêcheur se contente alors d’imprimer de brefs soubresauts pour rompre la monotonie de la dérive, bannière assez détendue (la gestion de sa tension est aussi capitale qu’en matière de pêche au toc). En mars, évitez les animations trop saccadées et les grands coups de scion. De plus, cette monture fait preuve d’une remarquable capacité d’adaptation lors d’un éventuel changement de configuration : si l’on désire une action plus verticale pour faire plonger le vairon près des obstacles par exemple, il suffit de pincer une chevrotine sur l’émerillon en tête pour l’obtenir. La modification reste en plus facilement réversible d’un coup de pince. Selon la masse d’eau, un lest interne de 2 à 5 gr est nécessaire pour racler le fond sans s’accrocher. Si le couple vitesse/profondeur moyen du parcours nécessite un grammage supérieur, une répartition du lest ¾ interne/ ¼ externe par ajout d’une chevrotine d’1 à 2 gr est préférable au recours à de gros vairons (les petits sont souvent les meilleurs !).
Monture Vairon Manié Garbolino
Pour conclure
Si le toc et le vairon sont les techniques reines pour l’ouverture de la truite, d’autres se montrent ponctuellement efficaces, c’est le cas de la mouche artificielle. Les éclosions d’éphémères (March Brown et Baetis Rhodani) rendent les truites très vulnérables à cette époque. Si les grandes rivières sont en place, guettez les gobages en bordure sur le créneau 13-16h. Attention, je vous parlais en début d’article d’un régime alimentaire peu sélectif en mars, mais la remarque n’est plus du tout valable lorsque les farios s’attablent en surface ! Dans ces moments là, on peut regretter d’avoir laissé mouches sèches et fouet à la maison, car il est illusoire d’espérer les leurrer avec autre chose… Vive la polyvalence !!!
Bonne ouverture à tous
Simon SCODAVOLPE